La stratégie d'investissement

février 2023

Les marchés financiers ont débuté l’année en fanfare. Pour combien de temps ?

Les marchés financiers ont débuté l’année en fanfare. Les raisons de cet enthousiasme tiennent aux signaux encourageants de désinflation et à de nouveaux constats d’amélioration économique perçus tout autour du globe. La probabilité de récession semble diminuer mais cette hypothèse ne peut pas être encore totalement exclue. Le contexte économique et financier plus favorable a permis aux marchés actions de s’installer dans la hausse alors que les résultats du 4ème trimestre 2022 publiés jusqu’à présent ont été mitigés. Cette déception et la poursuite des révisions baissières des estimations bénéficiaires ont été plus que compensées par la hausse des valorisations. Sur un mois, le PER des actions est remonté de 8%, signe d’un retour de la confiance et de prise de risque chez les investisseurs. La progression des actions s’est accompagnée de signaux techniques encourageants laissant entrevoir une poursuite du mouvement à plus court terme mais il est possible qu’elle s’interrompe d’ici quelques mois. C’est pour ces raisons que nous n’avons pas relevé nos objectifs pour les indices à fin juin qui sont inférieurs aux niveaux actuels pour intégrer un risque de déception dans les prochains trimestres. En revanche, nous les avons relevés pour la fin d’année dans l’hypothèse d’un soft landing réussi et d’un recul de l’inflation qui permettrait enfin d’anticiper un début de baisse des taux de la FED. Nous estimons qu’il n’est pas opportun de remonter les niveaux d’investissement en actions des portefeuilles. Nous préférons profiter des épisodes de volatilité et de repli pour le faire ou pour continuer à acheter des actions pour les portefeuilles très peu investis.

 

Les marchés financiers ont commencé l’année sur les chapeaux de roue. Contrairement aux attentes, ils ont poursuivi le rebond technique de début d’année pendant tout le mois. De nombreux indices actions ont retrouvé des niveaux proches de ceux qui précédaient la guerre en Ukraine ou les ont dépassés, enregistrant une hausse moyenne de 5%. Les taux d’intérêt ont également reflué en générant des gains d’environ 2% sur les produits obligataires européens.

Les raisons de cet enthousiasme tiennent aux signaux encourageants de désinflation que la FED et la BCE ont elles-mêmes reconnus. Elles estiment néanmoins que leur travail n’est pas achevé. D’une part, leurs taux doivent encore monter un peu, ce qu’anticipent également les marchés (+0.5% environ). D’autre part, elles ne prévoient toujours pas de rebaisser leurs taux en cours d’année, ce que les marchés ne veulent pas admettre. Les banquiers centraux craignent qu’après un temps de repli, l’inflation se stabilise à un niveau trop élevé, d’où leur prudence alors que les marchés voient eux les risques de ralentissement prononcé de la croissance. Cette question ne sera pas tranchée avant plusieurs mois car la tendance désinflationniste devrait se poursuivre au moins jusqu’à l’été, sans doute accompagnée d’une croissance moins hésitante, ce qui entretiendra la patience des investisseurs.

Ce dernier point est également le deuxième facteur d’optimisme des investisseurs. En effet, de nouveaux signes d’amélioration économique ont été perçus tout autour du globe. En Europe, l’activité a été plus résistante qu’attendu en fin d’année, en dépit d’une consommation des ménages morose. La croissance a faibli mais la récession a été évitée. Aux Etats-Unis, la croissance a été beaucoup plus soutenue malgré une tendance à la modération bien établie. Les premières indications pour janvier sont également positives avec de très fortes créations d’emploi accompagnées d’une hausse des rémunérations plus faible. La Chine elle-même a enregistré au 4ème trimestre une croissance sur 12 mois inférieure à celle du trimestre précédent mais dépassant les attentes, grâce au relâchement des restrictions sanitaires qui s’était amorcé en décembre et dont la levée en janvier s’est traduit par un redressement des indicateurs avancés. Il est d’ailleurs notable que, pour la première fois depuis un an, les prévisions de croissance pour 2023 des principales zones géographiques soient légèrement relevées grâce à la confirmation de la résilience de l’activité en fin d’année dernière. La croissance mondiale devrait cependant rester faible cette année.

La probabilité de récession semble diminuer mais cette hypothèse ne peut pas être encore totalement exclue.

 

 

Le contexte économique et financier plus favorable a permis aux marchés actions de s’installer dans la hausse alors que les résultats du 4ème trimestre 2022 publiés jusqu’à présent ont été mitigés. Aux Etats-Unis, sur un an, ils reculent de 7%, certes un peu moins que prévu mais le nombre de sociétés qui dépassent les attentes est moins élevé que d’habitude. De plus, les sociétés font état d’une certaine prudence, notamment sur les perspectives de la demande ou sur les marges. Mais, il semblerait que les efforts de contrôle des coûts annoncés par les grands groupes permettent d’atténuer les réactions négatives initiales des titres à la publication de résultats décevants. En Europe, les publications de résultats ont été moins nombreuses. Ceux-ci s’affichent encore en hausse de 15%, dépassant légèrement les attentes mais pour un nombre moins important de sociétés qu’habituellement.

Au-delà de ces résultats trimestriels, le mouvement d’abaissement des estimations de résultats pour 2022 et 2023 s’est poursuivi. Depuis le début de l’été, les estimations ont baissé de 10% sur l’indice américain S&P 500 ce qui est toujours en phase avec les attentes d’atterrissage en douceur de la croissance. Pour l’indice européen Stoxx600, la baisse des estimations n’atteint que 5.5% ce qui semble encore insuffisant. Ces révisions baissières ont été plus que compensées par la hausse des valorisations. Sur un mois, le PER des actions est remonté de 8% et cela constitue le seul moteur de la hausse des actions, signe d’un retour de la confiance et de prise de risque chez les investisseurs.

Ce mouvement de réappréciation a commencé en octobre 2022 mais les ratios de valorisation restent encore éloignés de leur niveau très élevé atteint début 2020 et ne semblent pas inquiéter les investisseurs.

Enfin, la progression des actions s’est accompagnée de signaux techniques encourageants laissant entrevoir une poursuite du mouvement à plus court terme. Si, en Europe, le potentiel de hausse semble assez limité, les actions américaines pourraient sans doute continuer à rattraper une partie du retard accumulé depuis quatre mois en monnaie locale vis-à-vis des actions européennes. Le comportement des grandes valeurs technologiques et du Nasdaq s’est également redressé et devrait y contribuer. En Europe, les secteurs cycliques ou très en retard devraient continuer à être plus performants de même que les valeurs sensibles à la reprise chinoise.

Il est possible que la remontée des actions s’interrompe d’ici quelques mois si la conjoncture économique montrait des signes de dégradation plus appuyée. Il est vrai que les indicateurs avancés de récession aux Etats-Unis restent allumés et la signalent plutôt pour le deuxième semestre. L’arrêt de la baisse de l’inflation serait un autre catalyseur possible. Le plus probable serait sans doute une consolidation des marchés, alimentée uniquement par des craintes similaires après une hausse devenue excessive.

C’est pour ces raisons que nous n’avons pas relevé nos objectifs pour les indices à fin juin. Ils sont inférieurs au niveau actuel pour intégrer un risque de déception dans les prochains trimestres. En revanche, nous les avons relevés pour la fin d’année dans l’hypothèse d’un soft landing réussi et d’une baisse de l’inflation qui permettrait enfin d’anticiper un début de baisse des taux de la FED.

 

Nous estimons qu’il n’est pas opportun de remonter les niveaux d’investissement en actions des portefeuilles.

Nous préférons profiter des épisodes de volatilité et de repli pour le faire ou pour continuer à acheter des actions pour les portefeuilles très peu investis.

 

Nous n’avons pas modifié nos opinions sur les actions. A court terme, nous gardons notre opinion Neutre et nous surpondérons à moyen terme les actions européennes et américaines. Nous restons à Neutre sur les autres zones géographiques, à l’exception de l’Europe de l’Est que nous sous-pondérons à court et moyen terme.

Nous avons légèrement modifié nos notes sectorielles. Nous avons abaissé celle des secteurs Santé et Pétrole & Gaz, qui profitent moins de l’environnement actuel et nous avons relevé celles de secteurs plus cycliques ou en retard (Construction & Matériaux, Biens et Services industriels, Biens de Consommation non cycliques, Technologie et Immobilier).

Nous maintenons une opinion Neutre à court terme et Sous-pondérer à moyen terme sur les produits obligataires. Les Emprunts d’Etat restent en tendance neutre à court terme et baissière à moyen terme. Les obligations privées ont retrouvé une tendance mois défavorable. Nous avons relevé à Neutre les obligations privées bien notées en Europe et aux Etats-Unis et celles à haut rendement aux Etats-Unis.

Lors de notre dernier Comité d’Allocation d’Actifs de fin janvier, nous avons allégé notre exposition en actions (en Europe essentiellement) pour prendre quelques bénéfices. Nous avons renforcé le poids des produits de taux (emprunts d’Etat US, produits multi-stratégies obligataires) tout en allégeant celui des produits Inflation.

 

Vincent GUENZI

Directeur de la Stratégie d’Investissement

Achevé de rédiger le 7 février 2023.