La stratégie d'investissement

février 2018

Brusque retour de la volatilité sur les marchés. Restons calmes !

Le mois de janvier a été à la hauteur des attentes mais il s’est terminé sur une note plus mitigée. La remontée des taux longs a fini par provoquer une forte correction. Mais celle-ci ne constitue pas la fin du cycle de hausse des actions aux Etats-Unis ou en Europe. Pour que la baisse s’amplifie, il faudrait que l’environnement change radicalement et rapidement, ce qui ne nous semble pas être le cas. Dans ce contexte, il faut se garder de prendre des décisions hâtives ou de vendre trop tard. Il vaut mieux garder une position assez équilibrée sans prise de risque excessive. La correction peut également être mise à profit pour initier de nouvelles positions en actions dans des portefeuilles insuffisamment investis.

Le mois de janvier a été à la hauteur des attentes mais il s’est terminé sur une note plus mitigée.

L’accumulation de bonnes nouvelles sur la croissance mondiale et l’adoption de la réforme fiscale aux Etats-Unis ont constitué deux motivations puissantes pour acheter des actions. De fait, en devises locales, la hausse des indices a été très forte dans de nombreux pays, les Etats-Unis en tête. Parallèlement, cet environnement a poussé les taux d’intérêt à la hausse, sans émouvoir les investisseurs dans un premier temps.

Par ailleurs, le dollar et l’euro ont connu de fortes fluctuations. L’appréciation de l’euro, qui semble justifiée à moyen terme, a été rapide. La BCE l’a bien signalé mais sans arriver à stopper la tendance. Parallèlement, la nouvelle baisse du dollar a suscité de nombreuses interrogations car la forte croissance économique et le relèvement progressif des taux de la FED devraient plutôt favoriser le dollar. Il est vrai que les déclarations ambiguës des représentants américains au forum de Davos et les craintes d’un retour du protectionnisme ont pesé sur la devise. Ces mouvements sur la parité Euro/dollar ont plutôt aidé les actions américaines et pénalisé les actions européennes au cours du mois.

Vers la fin du mois de janvier, une certaine euphorie gagnait les places boursières américaines à la suite des bons résultats publiés par les sociétés, alors que la hausse des taux longs s’amplifiait parallèlement.

La publication des données sur le marché du travail américain, avec des créations d’emplois fortes et inattendues et une hausse des salaires horaires de 2.9% sur un an, a constitué le catalyseur de la correction actuelle. Après avoir ignoré en partie l’intention de la FED de relever 3 fois ses taux en 2018, les investisseurs se sont mis à craindre une remontée plus forte de ceux-ci. Les taux américains à 10 ans se sont rapprochés de 3% (niveau jamais atteint depuis 2013) ce qui a renforcé les craintes des investisseurs boursiers.

Cette correction, qui menaçait, marque-telle la fin de la hausse des actions aux Etats-Unis et par voie de conséquence en Europe ? Ses catalyseurs et son ampleur pourraient le faire croire. Pourtant, nous n’en sommes pas convaincus pour plusieurs raisons.

 

Comme souvent, l’ampleur de la correction est proportionnée à la durée et à l’importance de la hausse qui l’a précédée. Une baisse si rapide est généralement le signe de ventes automatiques d’investisseurs de court terme (comme des fonds alternatifs) ou d’investisseurs particuliers désorientés (à l’image de la baisse du bitcoin). Cela ne signifie pas forcément le début d’un marché baissier.

Pour que la baisse s’amplifie, il faudrait que l’environnement d’inflation ou de croissance change radicalement et rapidement, ce qui ne nous semble pas être le cas.

Résumons les arguments défavorables: de fortes créations d’emplois et un faible taux de chômage sont le signe d’une économie forte et mature. L’accélération de la hausse du salaire horaire traduit la pénurie de main d’œuvre et les pressions salariales. Ceci se traduirait en inflation plus forte et amènerait la FED à durcir sa position (4 hausses des taux et non 3). La poursuite de cet enchainement pourrait créer la spirale inflationniste qui met fin aux phases de  croissance…Rien n’est moins sûr.

En effet, les données sur la hausse du salaire horaire sont très fluctuantes et sujettes à révision. Celles de janvier ont été impactées par des hausses du salaire minimum, par des effets climatiques et elles n’ont concerné que peu de secteurs. De plus, depuis 2016, la hausse du salaire horaire a oscillé entre 2.3% et 2.9%, sans marquer d’accélération en tendance. Cela n’a pas entraîné de résurgence de l’inflation qui est restée aux alentours de 2%.

Il faut donc se garder d’extrapoler ces données et d’en déduire prématurément une forte accélération de l’inflation. Nous préférons garder le scénario plus probable de remontée très progressive de ces variables économiques.

 

Aujourd’hui, l’écart entre les taux américains à 2 ans et à 10 ans est remonté à 0.7% et il devrait rester positif même si la FED réalise ses 3 hausses de taux. Il faudrait que cet écart soit négatif pour anticiper une récession à 10/12 mois. Nous en sommes loin.

De plus, le risque de récession et de fin de cycle boursier n’augmentera pas sérieusement tant que les taux de la FED diminués de l’inflation n’atteindront pas 1%. Ils sont aujourd’hui à -0.25% et pourraient passer à +0.50% fin 2018, ce qui laisse encore de la marge.

Enfin, si la valorisation des marchés actions est élevée dans de nombreux pays, une hausse raisonnable des taux longs ne remettrait pas en cause les tendances de moyen terme tant qu’il y a de la croissance économique et des bénéfices en progression. Le comportement des marchés au mois de janvier l’a bien illustré.

En résumé, l’activité mondiale ne nous semble pas menacée par un ralentissement dans un avenir proche. Un contexte de croissance soutenue et de remontée très progressive des taux devrait nous permettre d’éviter une forte crise boursière.

La correction actuelle nous semble être une alerte dans un cycle toujours haussier. Il y en aura certainement d’autres à l’avenir, ce qui se traduira par une remontée tendancielle de la volatilité.

 

Dans ce contexte, il faut se garder d’agir trop vite ou de vendre trop tard. Il vaut mieux garder une position assez équilibrée et ne pas prendre de risque supplémentaire tant que la situation des marchés ne s’est pas stabilisée.

En revanche, cette correction peut être mise à profit pour initier de nouvelles positions en actions dans des portefeuilles insuffisamment investis. 

Nous avons relevé nos prévisions à fin décembre pour les indices américain S&P500 et japonais Nikkei

Nous avions maintenu un objectif assez bas pour le S&P500 à fin juin pour prendre en compte le risque de correction au 1er semestre après une hausse très rapide en janvier. Sur l’année 2018, le potentiel d’appréciation des indices est d’environ 10%.

 

Nous avons adopté, à la fin du mois, une recommandation Neutre sur les actions à court terme, avec une petite préférence pour les actions asiatiques. Nous conservons une opinion Surpondérer à moyen terme en privilégiant les actions américaines, européennes, japonaises et asiatiques à moyen terme.

Nous relevons notre opinion à court terme sur les secteurs Industrie, Produits de Base, Banques et Services financiers, qui devraient être favorisés par la hausse des taux. Nous abaissons à Sous-pondérer le secteur Alimentation/Boissons. A moyen terme, nous réduisons à Sous-pondérer le secteur Services Publics.

Nous conservons une position Sous pondérer sur les produits obligataires à court terme comme à moyen terme, même si, après une hausse des taux si forte, un repli temporaire pourrait intervenir. Nous réduisons notre opinion à court terme sur les obligations privées à haut rendement de la zone Euro à Neutre et conservons une opinion Neutre sur les obligations convertibles de cette même zone.

Nous maintenons une position Neutre sur l’euro/dollar à court terme et une position surpondérer à moyen terme.

 

Dans notre allocation équilibrée, nous avons encore allégé le poids des actions en fin de mois, en le réduisant de 50.8% à 49.8%. Les actions européennes ont été réduites au profit des actions américaines et japonaises couvertes du risque de change.

Dans la partie défensive, l’essentiel de nos investissements repose sur des fonds de multi stratégie obligataire, associant dettes privées et souveraines et capables de profiter de la hausse comme de la baisse des taux longs. Nous avons augmenté le poids des produits Inflation/Indexés et des obligations émergentes. Nous avons allégé les Obligations privées américaines et les liquidités.

Vincent GUENZI

Directeur de la Stratégie d’Investissement

Achevé de rédiger le 8 février 2018.