La stratégie d'investissement

septembre 2021

Les marchés financiers ont réussi à surmonter les incertitudes durant l’été.

L’été s’est avéré propice aux actions américaines et européennes qui ont engrangé deux nouveaux mois de hausse. Les actions japonaises et émergentes ont été moins performantes, leur rebond du mois d’août effaçant une partie de leur baisse de juillet. Parallèlement, les taux d’intérêt à long terme des pays développés ont marqué un point bas en juillet avant d’amorcer un redressement. Leur niveau traduit encore un degré élevé de doute sur la vigueur de la reprise économique qui reste confrontée à plusieurs facteurs d’adversité. Au vu de leur positionnement sur les marchés, les investisseurs semblent relativement prudents. Nous partageons ce sentiment à court terme d’autant que l’automne se révèle souvent décevant pour les Bourses mais, objectivement, l’environnement général nous semble devoir rester positif pendant plusieurs trimestres et cela devrait favoriser la tendance haussière des indices à moyen terme. Nous maintenons une position neutre sur les actions à court terme et suggérons de continuer à profiter des replis même mineurs pour renforcer le poids des actions des portefeuilles encore sous-investis. Une correction plus importante des indices nous inciterait à relever nos expositions de manière plus générale.

La question sanitaire est restée au 1er plan durant l’été. Certes, l’Europe a fait figure de bon élève et a pu assouplir les mesures de précaution sanitaire. Mais les Etats-Unis, touchés à leur tour par le variant delta, enregistrent un fort rebond des contaminations. Au Japon, l’état d’urgence a été maintenu dans les grandes villes et une bonne partie de l’Australie reste confinée. Heureusement, le taux de vaccination progresse presque partout plus rapidement et les pays développés ont généralement atteint ou dépassé le niveau de 50% de vaccination complète de la population adulte. La vaccination des jeunes de plus de 12 ans y a commencé également. Cependant, le recours à une troisième injection, qui pourrait se généraliser, a suscité de nouvelles interrogations. Pourtant cela ne remet pas en cause la pertinence des vaccins. Ceux-ci protègent efficacement des formes graves du Covid19 et les vaccinés ne représentent que 10% des nouvelles hospitalisations. Mais comme l’immunité collective n’a pas encore été atteinte et que le taux d’anticorps commence à baisser chez les premiers vaccinés, il faut renforcer leurs défenses immunitaires. C’est une nouvelle illustration de la course de vitesse entre le virus et le vaccin. Enfin, l’apparition d’un nouveau variant plus dangereux n’est pas exclue et la rentrée scolaire en Ecosse a montré que les plus jeunes pouvaient être infectés. Il faut donc s’attendre à ce que les marchés évoluent encore au gré des bonnes et des mauvaises nouvelles issues du Covid-19 même si les répercussions nous semblent de mieux en mieux absorbées.

 

Le contexte économique n’est pas menacé à moyen terme. Il est vrai que les dernières statistiques publiées ont fait état d’une croissance un peu moins vigoureuse, ce qui s’est ressenti dans les évolutions des marchés.

Aux Etats-Unis, les activités de services comme la restauration, le tourisme et le transport aérien ont souffert de la recrudescence des contaminations. La hausse de la production industrielle s’essouffle également après plusieurs mois de fort rattrapage et du fait de difficultés d’approvisionnement persistantes. La crainte d’une normalisation monétaire trop rapide, qui pourrait étouffer la reprise, s’ajoute à l’anxiété sanitaire. Pourtant, les intentions de la Fed sont claires. Une réduction de ses achats d’actifs peut intervenir d’ici la fin de l’année si la reprise s’amplifie mais ceux-ci se poursuivront probablement pendant 6 à 12 mois. L’inflation est actuellement de 5.3% mais ce niveau est temporaire et devrait commencer à baisser. Si l’inflation finit par se stabiliser au-dessus de 2%, une première remontée des taux pourrait intervenir vers la fin 2022 ou début 2023. Et la Fed ne commencerait à diminuer la taille de son bilan qu’encore plus tard, réduisant ainsi les liquidités qu’elle a créées. La prudence de la Fed a certainement contribué à peser sur les taux à 10 ans et à orienter les investisseurs vers des actions à bonne visibilité comme les valeurs de croissance ou technologiques au détriment des valeurs cycliques.

En Europe, l’activité connait également un léger fléchissement mais le contexte sanitaire est moins pesant et le risque inflationniste est plus faible. Les marchés financiers ont évolué néanmoins en symbiose avec les marchés américains, à ceci près que l’absence de grandes valeurs technologiques a limité la progression des indices actions.

Les économies chinoise et japonaise suscitent davantage d’inquiétude. La dégradation de la situation sanitaire y a amplifié le recul de l’activité.

La reprise en main par les Autorités chinoises de secteurs tels que l’enseignement privé, les jeux électroniques en ligne et les grands acteurs de l’internet et l’incitation à favoriser un plus grand partage des richesses en faveur des classes moyennes ont apporté également une tonalité négative.

Cependant, la Chine ne peut pas mettre en péril sa stabilité financière ou sa croissance. Elle a commencé à assouplir les conditions du crédit et le dialogue a repris pour apaiser les tensions avec Washington qui étaient réapparues. En Europe, la mise en œuvre du plan de relance vient de débuter et il soutiendra l’activité dans les prochains mois. Enfin, les parlementaires américains poursuivent les négociations sur le prochain plan de relance de 3500 milliards de dollars de Joe Biden. La bonne santé financière des ménages et la baisse du chômage devraient continuer à stimuler la consommation dans les pays développés. Dans ces conditions, il semble logique que les prévisions pour 2022 fassent état d’une croissance encore soutenue, quoique légèrement inférieure à celle de 2021. Sauf évènement majeur imprévu, il est trop tôt pour envisager une récession et les doutes actuels sur la vigueur de la reprise devraient plutôt s’estomper.

Malgré la hausse des indices actions, la prudence prédomine sur les marchés financiers. Les incertitudes économiques et sanitaires ont poussé les taux longs d’intérêt à long terme encore plus bas durant l’été. Cet excès de baisse ainsi que l’anticipation du discours du Président de la Fed au symposium de Jackson Hole ont provoqué un rebond technique des taux mais la poursuite de leur remontée n’est pas encore acquise au vu des réactions très calmes des investisseurs à ce discours où le processus de normalisation monétaire a été envisagé dès cet année. Apparemment, les investisseurs ne l’attendent pas aussi tôt sinon les taux monteraient davantage. Pour les mêmes raisons, ils préfèrent les valeurs les moins risquées et les moins cycliques. Ce comportement prudent ne s’est pas traduit par une baisse des indices grâce à deux autres facteurs très positifs : les publications des résultats trimestriels qui ont dépassé toutes les attentes et le relèvement des estimations bénéficiaires des analystes pour 2021 (d’environ 10% en Europe et 5% aux Etats-Unis). Ainsi la hausse des résultats a été plus forte que la baisse des ratios de valorisation entrainée par la prudence des investisseurs.

Les valorisations des marchés actions sont devenues plus raisonnables en absolu. Elles le restent aussi en relatif par rapport aux obligations. C’est très encourageant pour la poursuite de leur tendance haussière. La prudence des investisseurs peut se comprendre compte tenu de l’absence de correction marquée depuis 7 mois et de leur attentisme avant les mois de septembre et d’octobre traditionnellement plus décevants mais elle devrait diminuer quand les statistiques économiques se raffermiront.

Nous avons relevé nos prévisions sur les indices pour décembre 2021 et juin 2022 de 1 à 2% en Europe et de 5% aux Etats-Unis. Le potentiel de progression à cet horizon est du même ordre de grandeur. De ce fait, il nous semble toujours déraisonnable de renforcer l’exposition en actions des portefeuilles à l’exception de ceux en cours de constitution. Une correction fournirait de meilleurs points d’entrée pour relever de manière plus générale le poids des actions.

Nous maintenons nos opinions, Neutre à court terme et Surpondérer à moyen terme, sur les actions américaines et européennes, et Neutre sur les autres zones géographiques. Nous gardons des disponibilités pour protéger les portefeuilles en cas de volatilité et dans l’attente d’opportunités d’achat.

Nous avons procédé à de nombreux ajustements dans nos recommandations sectorielles à court terme pour intégrer les évolutions récentes des indices sectoriels européens. A moyen terme, nous avons relevé la Technologie à Surpondérer, l’Immobilier à Neutre et nous avons abaissé la Distribution à Neutre. L’évolution des taux d’intérêt à 10 ans devrait continuer à conditionner les performances relatives des secteurs cycliques ou value face aux secteurs défensifs ou croissance.

Malgré le répit offert par la baisse des taux américains et compte tenu de leur remontée probable, nous conservons une opinion Sous-pondérer à court et à moyen terme sur les produits obligataires. Nous ne privilégions que les obligations européennes convertibles (à moyen terme seulement) ou à haut rendement.

Lors de notre dernier Comité d’Allocation d’Actifs de juillet, nous n’avons globalement pas modifié notre allocation et celle-ci est restée inchangée depuis. Nous maintenons une position tactique équilibrée.

Vincent GUENZI

Directeur de la Stratégie d’Investissement

Achevé de rédiger le 10 septembre 2021.