La stratégie d'investissement

décembre 2018

Les investisseurs doivent se préparer à un risque de volatilité élevée.

Le mois de novembre s’est soldé par une relative stabilisation des marchés suivie d’une rechute cette semaine.

Pourtant, des signaux plus positifs ont commencé à apparaître. Les marchés financiers ont donc préféré se concentrer sur les sujets d’inquiétude. Quel scénario retenir pour les prochains mois ? Les investisseurs doivent se préparer à un risque de volatilité élevée qui justifie de conserver des positions prudentes à moyen terme assorties de positions tactiques plus opportunistes. A l’inverse, l’amélioration possible du contexte géopolitique, économique et monétaire redonnerait un potentiel de hausse plus important aux indices actions.

Après un mois de novembre qui s’est soldé par une relative stabilisation, les marchés viennent de connaitre une nouvelle semaine éprouvante. Pourtant, des signaux plus positifs ont commencé à apparaître.

Américains et Chinois ont effectivement décrété une trêve de 90 jours lors du G20. Elle doit permettre la reprise des négociations sur le respect de la propriété intellectuelle, l’ouverture plus large du marché chinois, les transferts de technologie, les barrières non tarifaires, etc… Dans l’intervalle, en échange du maintien des droits de douane actuels américains, la Chine devrait importer davantage de produits américains. Mais les opérateurs ne croient plus à un accord au terme de cette trêve car les positions des deux parties semblent trop éloignées et aucune ne veut perdre la face. Dans le même temps, la modération de la croissance en Chine mais aussi aux Etats-Unis rend les deux pays plus vulnérables en cas d’affrontement commercial ce qui pourrait amener leurs dirigeants à des compromis, en négociant par étapes. Evidemment, la lutte pour le leadership mondial ne s’arrêtera pas pour autant.

La position de la FED semble plus conciliante. Après une hausse de 0,25% le 19 décembre prochain, elle pourrait procéder à une pause dans la remontée des taux pour avoir le temps d’apprécier l’impact des hausses précédentes. De fait, l’activité immobilière est moins vigoureuse, les conditions de crédit pour les entreprises se sont durcies. Parallèlement, le risque inflationniste ne s’est toujours pas manifesté, ce qui justifierait pleinement cette pause. Les marchés n’y croient pas ou pensent que cela serait insuffisant pour permettre aux Bourses de se redresser. C’est oublier que chaque fois que la FED a interrompu temporairement son cycle de durcissement monétaire (en 1967, en 1987, en 1995 et en 2016), un rebond marqué des actifs risqués a eu lieu.

L’environnement économique semble se stabiliser ou s’améliorer dans les pays émergents au vu des derniers indicateurs, notamment au Brésil, en Inde et même en Chine. Aux Etats-Unis, l’activité reste vigoureuse en dépit d’une tendance qui doit continuer à se modérer. La forte baisse du pétrole sera peut-être endiguée par un prochain accord au sein de l’OPEP avec la Russie mais les cours actuels apportent une bouffée d’oxygène à de nombreux pays. En Europe, l’Italie semble être prête à adoucir sa position en réduisant le déficit de 2.4% prévu dans son budget. Plus que la position ferme de Bruxelles, qui menace de lancer la procédure dite de déficit excessif, c’est le manque d’appétit des ménages italiens pour l’emprunt émis par l’Etat qui aurait rendu ses dirigeants plus pragmatiques.

Les marchés financiers ont préféré se concentrer sur les sujets d’inquiétude. Theresa May arrivera-t-elle à faire voter l’accord négocié avec Bruxelles par son parlement le 11 décembre alors que toutes les prévisions donnent le résultat inverse? Le pays est-il condamné à une sortie sans accord aux conséquences dramatiques ? Ou bien les députés auront-ils peur du chaos au dernier moment quitte à proposer un nouveau référendum ?

Outre le Brexit, l’agitation sociale en France inquiète aussi les investisseurs à cause du manque à gagner des entreprises, des dégâts à payer, du risque d’arrêt des réformes ou de creusement des déficits publics. La montée des populismes, facteur commun à toute l’Europe, est de mauvais augure pour les élections européennes de 2019.

Enfin, on reparle de la prochaine fin du cycle économique aux Etats-Unis puisque plusieurs indicateurs précurseurs viennent de clignoter: la courbe des taux, la hausse des taux des emprunts à haut rendement, la hausse des taux de défaut et la baisse des marges des entreprises. Effectivement, ces facteurs sont moins bons qu’auparavant mais ils n’ont pas atteint le seuil critique qui rendrait une récession imminente. Cela nous semble toujours prématuré mais les investisseurs redoutent que le protectionnisme accélère le ralentissement économique.

Les marchés ignorent les bonnes nouvelles quand ils entrent en phase de correction anxiogène auto-entretenue. Ils commettent alors des excès, comme au mois d’octobre. Le rebond technique que nous espérions a eu lieu. Mais, par insuffisance de bonnes nouvelles, sa faible ampleur l’a rendu peu convaincant. Dès lors, il est compréhensible que les indices soient revenus au plus bas ou les aient enfoncés.

 

Quel scénario retenir pour les prochains mois ? Il faut rester prudent. Le risque de correction plus forte a augmenté. Pour autant, nous ne croyons pas encore à l’arrêt du cycle boursier et économique américain. En effet, le changement d’attitude de la FED nous semble plausible car ses déclarations visent toujours à préparer les investisseurs pour ne pas les surprendre. Si l’inflation ne dérape pas, la pause de la FED changerait la donne.

Nous sommes plus circonspects sur les probabilités de réels succès des négociations commerciales. De même, le Brexit générera encore de la volatilité et la situation économique ou politique en Europe pourrait continuer à peser. Le cours des actions reflète déjà la montée du pessimisme des investisseurs.

Les investisseurs doivent se préparer à un risque de volatilité élevée et peut-être durable qui justifie de conserver des positions prudentes à moyen terme assorties de positions tactiques plus opportunistes. A l’inverse, la confirmation d’un contexte géopolitique, économique et monétaire plus favorable redonnerait un potentiel de hausse plus important aux indices actions. Nous n’excluons pas ce scénario.

 

Nous avons encore abaissé nos prévisions d’environ 2% pour la fin de l’année et pour la fin-juin 2019. Compte tenu du repli des derniers jours, le potentiel d’appréciation dans les prochains mois dépasse 10% en Europe et 5% aux Etats-Unis. Toutefois, un fort redressement de la confiance serait nécessaire pour l’atteindre.

 

Nous avons conservé notre recommandation globale sur les actions, toujours Neutre à court terme et Surpondérer à moyen terme. Mais nous relevons notre position à court terme sur les actions émergentes en surpondérant les actions asiatiques. Les actions américaines nous semblent toujours mieux orientées et moins risquées que les actions européennes.

 

Nous adoptons une position plus prudente sur nos recommandations sectorielles à moyen Terme. Nous avons relevé les secteurs Alimentation & Boissons, Télécommunications à Surpondérer. Nous avons abaissé en contrepartie les secteurs Produits de Base, Chimie, Construction et Matériaux, Biens et Services Industriels à Sous pondérer, les Services Financiers et la Technologie à Neutre.

Nous réduisons notre opinion sur les produits obligataires à Sous pondérer à court et à moyen terme. Nous n’avons abaissé notre recommandation à court terme sur les obligations convertibles à Sous pondérer.

 

Dans notre allocation équilibrée, nous maintenons une position prudente. Mais en fin de mois, nous avons profité de la baisse des cours et relevé tactiquement la pondération des actions de 3.3% de manière répartie sur toutes les zones. Nous avons réduit le poids des liquidités et des produits obligataires sauf les emprunts des pays périphériques européens.

 

Vincent GUENZI

Directeur de la Stratégie d’Investissement

Achevé de rédiger le 7 décembre 2018.