La stratégie d'investissement

décembre 2020

La découverte de vaccins change la donne et redonne confiance aux investisseurs.

Le mois de novembre a été marqué par deux évènements majeurs: l’élection aux Etats-Unis du candidat démocrate Joe Biden et plus encore l’annonce de l’efficacité de plusieurs vaccins contre le Covid-19. Cela se traduit par un recul important des incertitudes et les marchés l’ont acté immédiatement et très fortement. Cependant, l’amélioration des perspectives se traduit également par un scénario plus favorable pour les actifs risqués et les actions. Si les risques de consolidation à court terme demeurent, la tendance de fond reste haussière. Après avoir relevé nos objectifs pour les indices, leur potentiel de hausse à 6 et 12 mois reste appréciable, de respectivement 5 et 10%. Tout repli doit être exploité pour renforcer si nécessaire l’exposition en actions des portefeuilles et pour adapter leur composition sectorielle.

Le mois de novembre a été marqué par deux évènements majeurs. Si les élections américaines ont réservé quelques surprises qui ont entretenu un suspense en Bourse, l’annonce des premiers vaccins contre le Covid-19 a été saluée immédiatement et très fortement. Les marchés ont-ils sur réagi alors que le redressement de l’économie mondiale n’en est qu’à ses débuts et que la pandémie fait toujours des ravages ? Quels impacts peut-on attendre des campagnes de vaccination ? Comment intégrer ces informations dans les prévisions économiques et financières ? Faut-il investir en Bourse maintenant ?

Donald Trump ne s’avoue pas vaincu. D’ailleurs, il n’a pas démérité, recueillant plus de voix que Barack Obama en son temps et aidant son parti à réduire son retard à la Chambre des Représentants. Mais le décompte des Grands Electeurs est achevé et ses recours en justice sont perdus les uns après les autres. Il devrait reconnaitre sa défaite le 14 décembre, jour du vote des grands Electeurs. De son côté, Joe Biden n’a pas permis au parti démocrate de remporter la majorité au Sénat pour l’instant. Les deux derniers sénateurs à élire, en Géorgie, Etat républicain, pourraient faire pencher la balance en sa faveur s’ils étaient tous les deux démocrates : réponse le 5 janvier. Le sujet est important comme nous l’avons déjà signalé. Sans majorité au Sénat, les projets de loi les plus progressistes de Joe Biden ne seront pas adoptés et Wall Street en a pris acte.

Mais l’incertitude a tout de même reculé. La transition de l’administration est enfin engagée. Les premières nominations de la nouvelle équipe gouvernementale (à la diplomatie, au climat, à la sécurité) ont rassuré les marchés qui ont surtout apprécié la probable nomination de Janet Yellen, ancienne Présidente de la Fed, à l’économie. Enfin, les négociations sur un plan de relance minimum, de 900 milliards de $ soit 5% du PIB, ont été relancées pour tenter de le voter avant Noël et avant l’extinction des aides aux ménages américains les plus touchés.

Comme nous en avons maintes fois exprimé l’espoir, trois vaccins ont été annoncés pour l’instant avec une efficacité dépassant 90% soit beaucoup plus que les seuils nécessaires (50/60%). Un premier a été approuvé au Royaume-Uni, l’Agence américaine devrait se prononcer le 8 décembre, l’Europe suivra si possible avant la fin de l’année. Les campagnes de vaccinations commenceront prochainement. Mais la pandémie ne sera pas vaincue avant plusieurs trimestres et elle fait encore rage. Les vaccinations permettront cependant de la contrôler progressivement en commençant par protéger les populations les plus fragiles dans les pays développés, celles qui ont submergé les systèmes de santé au printemps et qui risquaient de le faire à nouveau en novembre. Dans ces conditions, si ces vaccins sont réellement efficaces, il ne sera bientôt plus nécessaire de procéder à de nouveaux confinements. Même si toute la population des pays développés n’est pas vaccinée dans les prochains mois et si la pandémie n’est pas totalement jugulée, les risques de rechute de l’activité vont donc diminuer avec le temps.

Les perspectives économiques pour 2021 se voient ainsi renforcées. Après un premier trimestre probablement encore difficile du fait de la pandémie, la reprise s’étoffera progressivement au cours de l’année. Vers la fin de l’année, selon les pays, les niveaux d’activité de fin 2019 seront presque retrouvés. Mais de nombreux secteurs resteront encore sinistrés (transports, hôtellerie, restauration, loisirs, commerces…) Ceci justifiera la prolongation de mesures de soutien, progressivement plus ciblées, aux Etats-Unis (après le probable plan de 900 milliards) et en Europe, quand la Communauté Européenne, aura trouvé le moyen de contourner le véto de la Hongrie et de la Pologne, opposées aux conditions du Plan de relance relatives à l’Etat de droit. Malgré les aides des Etats, le chômage restera élevé pendant plusieurs trimestres et le nombre de faillites d’entreprises augmentera.

Mais rappelons-le, il en est toujours ainsi pendant et après les récessions. Ces phénomènes n’empêcheront pas la reprise de la croissance mondiale mais elle sera variable selon les pays et fragile encore quelques temps. C’est pour cela que les Banques Centrales maintiendront leurs politiques monétaires très accommodantes afin de faciliter le financement des Etats et des entreprises aussi longtemps que nécessaire. La Fed et la BCE devraient sans doute décider en décembre d’accentuer leurs achats d’obligations comme la Banque d’Angleterre l’a déjà fait en novembre. Pour toutes ces raisons, les prévisions de croissance actuelles, environ 4% aux Etats-Unis, 4.5% en Zone Euro, ont toutes les chances d’être réalisées en 2021 et même dépassées dans certains pays comme cela est souvent le cas après des chocs violents grâce notamment à l’émergence de nouvelles activités. Ajoutons que les pays d’Asie, dont l’activité est déjà mieux orientée, vont bénéficier de l’apaisement des tensions commerciales après le départ de Donald Trump, tout comme l’Europe d’ailleurs. La Chine atteindra également ses objectifs économiques malgré un maintien probable mais moins anxiogène des pressions occidentales.

Les marchés actions ont salué cette amélioration de la visibilité par un retour de l’optimisme et par une frénésie d’achat. Les marchés de taux ont été calmes car la présence des Banques Centrales bloque toute hausse excessive des taux longs. Les obligations privées ont progressé pour les mêmes raisons que les actions. La hausse des indices actions a atteint en moyenne 10% mais celle des secteurs et des valeurs en retard a été encore plus forte: en Europe, les secteurs Banque et Pétrole & Gaz ont gagné 30%, l’Assurance 25%, l’Automobile 22% et le Tourisme/Loisirs 18%. Ces hausses sont-elles excessives ? Eu égard à la situation sanitaire encore fragile en Europe et très délicate aux Etats-Unis, des consolidations sont possibles sur les secteurs cycliques ayant le plus rebondi. Mais par ailleurs, l’appétit des investisseurs pour ces secteurs à moyen terme est loin d’être rassasié car ils n’ont pas encore rattrapé leurs niveaux d’avant crise et ils offrent donc le potentiel le plus important à horizon 2021 et 2022. Nous le constatons depuis le début du mois de décembre : malgré les chiffres alarmants de contagion aux Etats-Unis, les indices tiennent et la rotation vers les valeurs cycliques se poursuit plus tranquillement. Enfin, il faut signaler que les liquidités investies pour l’instant en produits de trésorerie aux Etats-Unis et en Europe représentent des sommes colossales et elles constituent un réservoir qui pourra se déverser vers les actions avec la diffusion du rebond de la confiance à venir.

En termes de stratégie d’investissement, les scénarios des investisseurs institutionnels pour 2021 sont donc chamboulés par l’amélioration escomptée des perspectives économiques. Pour les actifs risqués et les actions, si les risques de consolidation à court terme demeurent, la tendance de fond reste haussière d’autant que l’attractivité des actions sera renforcée par le maintien des taux longs à un bas niveau. Tout repli doit être exploité pour renforcer si nécessaire l’exposition en actions des portefeuilles et pour adapter leur composition sectorielle. Les secteurs s’étant le mieux comportés pendant la crise seront conservés ou allégés alors que les secteurs encore en retard et touchés moins durablement par la crise sanitaire pourront être re-pondérés. Les secteurs plus vulnérables comme le transport aérien, l’hôtellerie ou ceux liés au commerce conservent un potentiel important mais sont plus spéculatifs.

Nous avons relevé nos objectifs sur les indices pour décembre 2020, juin et décembre 2021. Le potentiel de progression dépasse 5% à six mois et 10% à 12 mois. La hausse sera alimentée par le rebond des résultats (qui pourrait dépasser les estimations actuelles) plus que par la hausse des valorisations (PER) qui sont déjà élevées.

Nous maintenons notre opinion Surpondérer sur les actions à court et moyen terme. Nous continuons à privilégier les actions américaines (davantage couvertes du risque de change) celles d’Asie ex Pacifique et dorénavant les actions européennes. Nous avons modifié assez sensiblement nos opinions sectorielles (voir p.13) en faveur de secteurs en retard et sous évalués au détriment de secteurs défensifs, bien valorisés ou moins bien orientés.

 

Nous adoptons une opinion Sous-pondérer à court et à moyen terme sur les produits obligataires et les liquidités. Nous privilégions les emprunts d’Etat d’Europe du Sud et les obligations convertibles, à court terme et les obligations émergentes à moyen terme.

Fin novembre, nous avions allégé tactiquement le poids des actions de manière marginale, avec une augmentation des actions japonaises et une baisse des actions américaines et européennes. Nous avions relevé parallèlement le poids des produits de taux (Crédit US, Convertibles, Inflation) et des liquidités.

Vincent GUENZI

Directeur de la Stratégie d’Investissement

Achevé de rédiger le 7 décembre 2020.