La stratégie d'investissement

janvier 2022

Un contexte toujours favorable aux actions en 2022 malgré le Covid et malgré la FED.

Le variant Omicron a confirmé sa virulence mais aussi sa moindre dangerosité. C’est pourquoi les Bourses des grands pays développés ont comblé leurs pertes et établi de nouveaux sommets en début d’année. Sur le plan de l’activité, les conséquences sont bien réelles mais l’impact économique de cette dernière vague devrait probablement être plus faible et plus limité dans le temps que la précédente, comme nous l’espérions. L’environnement économique devrait donc rester porteur au-delà des prochaines semaines encore incertaines. Cependant, ce constat ne peut pas s’appliquer à toute la planète, notamment aux pays émergents à l’exception peut-être de la Chine qui a décidé d’accentuer son assouplissement monétaire. La hausse des bénéfices attendue permettra aux indices des pays développés de progresser malgré des valorisations un peu élevées. Ce schéma serait remis en cause si les marchés s’inquiétaient davantage de la FED que du Covid. Celle-ci semble en effet adopter une posture plus rigoureuse qu’attendue face au risque de persistance d’une inflation élevée. Toutefois, la normalisation de sa politique dépendra in fine des évolutions de l’inflation et du marché de l’emploi. Si l’environnement économique reste porteur et si l’inflation finit par revenir sous 3%, ce qui est attendu par le consensus, les marchés actions progresseront encore cette année en fluctuant au gré des incertitudes sanitaires, monétaires ou géopolitiques. La hausse des indices devrait être moins forte et moins régulière. Nous avons légèrement relevé nos prévisions à 6 et 12 mois pour les indices actions et celles-ci pourraient l’être encore en cours d’année. Le potentiel de progression des indices est pour l’instant de l’ordre 5 à 10% pour la fin d’année.

Omicron sera-t-il la dernière menace ? Après avoir reculé de 6% en moyenne entre le 20 novembre et le 20 décembre derniers, les Bourses des grands pays développés ont comblé leurs pertes et établi de nouveaux sommets en début d’année. Pourtant, toutes les craintes sur la virulence de ce variant se sont avérées fondées avec une envolée des cas de contaminations et la mise en place de nouvelles mesures restrictives en Europe et en Asie. La baisse initiale des Bourses reflétait la crainte d’un impact négatif important du virus sur l’activité économique. Heureusement, assez rapidement, de premières études en provenance d’Afrique du Sud puis du Royaume-Uni ont montré que la hausse fulgurante des contaminations ne s’accompagnait pas d’une remontée aussi forte des hospitalisations et des décès, bien au contraire. L’Afrique du Sud semble même avoir déjà mis un terme à cette nouvelle vague du Covid. Certes, cette vague refluera progressivement, en commençant par l’Europe et l’Asie et en finissant probablement par les Etats-Unis. En effet, cette 5ème vague de Covid a montré les différences existant entre les pays. Par exemple, en Europe, les écarts de taux de vaccination, de gestion des réouvertures et des restrictions des économies, ou d’instrument de contrôle (passe sanitaire ou non) ont eu pour conséquence des contagions plus ou moins fortes et des réponses politiques différentes en termes de nouvelles limitations. La belle homogénéité qui régnait fin 2020 et jusqu’à l’automne 2021 a disparu et cela a accentué le côté anxiogène de cette nouvelle vague. Aujourd’hui, en Europe, nous pouvons sans doute être rassurés sur sa fin prochaine mais ce n’est pas encore le cas aux Etats-Unis, pays beaucoup moins vacciné, et dans de nombreux autres pays, notamment émergents. Il n’empêche que les mutations de ce virus semblent présenter des analogies avec le passé où elles ont engendré souvent des contagions plus rapides mais moins dangereuses et c’est finalement ce que les marchés financiers veulent en retenir. Leur confiance est d’autant plus forte que de nouveaux vaccins plus efficaces viendront s’ajouter à ceux existants et déjà bien protecteurs. Les plus optimistes pensent d’ailleurs que le variant Omicron pourrait contribuer à atteindre la fameuse immunité collective que l’Afrique du Sud ou Israël atteindront peut-être prochainement.

Sur le plan de l’activité, les conséquences sont bien réelles. Les restrictions et les confinements impactent à nouveau le secteur des services notamment (restauration, hôtellerie, tourisme, transports aériens). De nombreuses activités pourraient souffrir de l’absentéisme des salariés engendré par les mesures de confinement. Dans les pays où la vaccination est moins efficace, comme la Chine, la stratégie de confinement strict peut également entrainer des perturbations dans le fonctionnement de l’industrie, des ports et donc dans les échanges commerciaux. Les chaines d’approvisionnement, déjà bien affectées, pourraient en souffrir plus longtemps avec d’éventuels dérapages sur les prix. Toutefois, l’impact économique de cette dernière vague devrait être plus faible et plus limité dans le temps que la précédente, comme nous l’espérions.

 

L’environnement économique devrait donc rester porteur au-delà des prochaines semaines encore incertaines. Il serait logique que les premiers signaux favorables viennent d’Europe où les indicateurs précurseurs ont fléchi dès l’automne. Le retournement récent et plus brutal des indicateurs américains ne laisse pas de place au doute sur le tassement de l’activité à venir. Mais il ne faut pas oublier les facteurs de résilience déjà présents. Le niveau d’activité était relativement élevé dans les pays développés, les aides publiques restent en place et les plans de soutien sont mis en œuvre, l’épargne des ménages est abondante et la situation financière des entreprises est relativement saine, le chômage recule presque partout. La demande restera soutenue et il ne faut pas craindre un ralentissement prononcé ou durable. Au contraire, le rebond, une fois encore, sera soutenu et c’est également un motif de confiance et d’optimisme pour les marchés actions.

Cependant, ce constat ne peut pas s’appliquer à toute la planète. Parents pauvres de la vaccination, les pays émergents le sont aussi sur le niveau de l’activité. Les dernières statistiques ne sont pas aussi favorables et de nombreuses Banques centrales y ont engagé le relèvement de leur taux d’intérêt pour lutter contre l’inflation ou pour protéger leur devise. Exception notable, la Chine a décidé d’accentuer l’assouplissement monétaire récemment mis en œuvre pour combattre l’essoufflement de l’économie et du marché immobilier. Ceci est de bon augure si la vague Omicron ne se prolonge pas trop longtemps.

Normalement, les petites révisions baissières sur la croissance mondiale qui ont débuté cet été devraient donc s’arrêter. Il en est de même pour les estimations de bénéfices des entreprises cotées. Si les analystes financiers les ont réduites légèrement sur un mois, par précaution et pour cause de variant Omicron, le discours des entreprises n’est pas alarmiste. Les prévisions de croissance de résultats pour 2022 sont d’ailleurs raisonnables, entre +5 et +10%, et peuvent faire l’objet de relèvements en cours d’année si l’amélioration des chiffres d’affaires et des marges se poursuit. Les valorisations des actions étant élevées mais pas excessives globalement, la hausse des bénéfices se traduira par une progression des indices boursiers.

 

Aujourd’hui, les marchés semblent s’inquiéter davantage de la FED que du Covid. La forte reprise économique depuis 2020 s’est accompagnée de dysfonctionnements et d’une forte hausse des prix. Or les goulets d’étranglement et les perturbations sur les chaines de production ne se résorbent pas vite même si des signaux d’amélioration commencent à apparaitre. L’inflation continue à augmenter, de même que les salaires dans une certaine mesure, sans que cela ne constitue une véritable spirale inflationniste. L’inflation restant élevée et persistante, les Banques centrales de pays moins solides que les Etats-Unis ou l’Europe ont déjà relevé leurs taux plusieurs fois. La BCE ne pense pas les relever avant 2023 mais la Banque d’Angleterre vient de commencer à le faire. Partout les conditions monétaires ont commencé à se durcir sauf en Eurozone, au Japon et aux Etats-Unis. Pour la FED, le niveau de l’inflation et de l’emploi nécessitait qu’elle rassure les marchés sur ses intentions. Elle ne pouvait plus apparaitre trop laxiste, au risque de laisser monter les anticipations d’inflation à moyen terme, plutôt contenues pour l’instant.

C’est la raison pour laquelle, son Président a déclaré que la FED ne pouvait plus considérer l’inflation comme temporaire et qu’elle devait accélérer la réduction des injections de liquidités (les achats d’actifs obligataires) pour procéder plus rapidement à une première hausse des taux à la fin du printemps. S’en suivraient deux autres en 2022 et trois autres en 2023 selon les prévisions des Gouverneurs de la FED. Sans surprise, la FED a confirmé les propos de son Président lors de la réunion du 15 décembre dernier mais les marchés financiers ne s’en sont pas émus, les taux d’intérêt à long terme restant stables. C’était sans doute un effet Omicron car, depuis, les taux à 10 ans américains sont remontés de 1.35% à 1.51% en fin d’année et même 1.77% aujourd’hui. Ce mouvement a entrainé à la hausse les taux d’intérêt de nombreux pays développés. L’accélération récente a eu lieu quand les investisseurs ont appris que la FED pourrait également commencer à réduire la taille de son bilan assez rapidement après sa première hausse des taux, ce qui n’était absolument pas anticipé. Or, l’étude de situations analogues nous enseigne que les marchés actions américains traversent relativement bien les périodes de hausse des taux de la FED jusqu’à ce que celle-ci retire des liquidités des marchés (c’est la réduction de la taille de son bilan) ou bien que les taux à 10 ans ne passent sous les taux à 2 ans, signal précurseur de récession. Arriverons-nous rapidement à cette situation de retrait de liquidités comme la FED le laisse entendre ?

Si l’inflation devait réellement persister à un niveau élevé (supérieur à 4% par exemple) sans commencer à refluer au cours du 1er semestre, cela pourrait amener les investisseurs à craindre que la FED va persister dans cette voie, au risque d’alimenter une hausse des taux longs au-delà du raisonnable et une anticipation de ralentissement économique qui en découlerait.

Si l’inflation commence à refluer au cours du 1er semestre, la FED pourrait alors tempérer ses ardeurs en expliquant que l’inflation n’était finalement que temporaire comme tout le monde l’espérait initialement.

Personne ne connait aujourd’hui la réponse à cette question mais le consensus et la FED elle-même prévoient une inflation en fin d’année 2022 à 2.6% contre 6.9% actuellement. Après la récente hausse des taux à 10 ans, il est possible que celle-ci se calme un peu, d’autant que les Etats-Unis ne sont pas encore sortis de la 5ème vague de Covid et que les prochaines statistiques économiques pourraient décevoir. Mais une chose parait sûre, si l’économie se redresse avec l’extinction de la pandémie, les taux courts et longs ne resteront pas au niveau actuel. Cela valide notre hypothèse de remontée des taux longs vers 2% cette année, en supposant que l’inflation refluera à partir du printemps.

L’environnement économique restant porteur, si l’inflation finit par revenir sous 3%, les marchés actions progresseront encore cette année en fluctuant au gré des incertitudes (Covid, risques géopolitiques avec la Chine ou la Russie) et des anticipations sur la politique monétaire américaine. C’est pourquoi nous anticipons une année où la volatilité sera plus importante et la hausse des indices moins régulière.

 

Nous avons remonté nos prévisions d’environ 3% pour l’indice européen Eurostoxx 50 et pour le CAC40 et de 1% pour l’indice japonais. Par rapport aux cours actuels, le potentiel de progression des indices est de l’ordre de 2 à 5% à mi-2022 et entre 5 et 10% pour la fin 2022. Ces objectifs sont assez conservateurs et pourraient être relevés en cours d’année.

 

Mais compte tenu de la hausse intervenue depuis un mois, il peut paraitre difficile d’acheter encore des actions à ces niveaux. C’est certainement le cas des actions qui ont très bien performé en 2021, essentiellement des valeurs de croissance comme par exemple le luxe ou les valeurs technologiques. En revanche, de nombreux titres plus risqués, plus cycliques n’ont pas retrouvé leur meilleur niveau. Ils peuvent être encore achetés progressivement, en profitant des hésitations qui arrivent régulièrement.

 

Toute baisse des cours doit ainsi être mise à profit pour augmenter le poids des actions des portefeuilles en cours de constitution ou des portefeuilles déjà investis qui disposeraient de liquidités un peu trop importantes.

 

Sur le plan géographique, les risques nous semblent un peu plus élevés sur les actions américaines (Covid, FED) que sur les actions européennes (BCE plus souple, sortie de la vague Omicron plus rapide). Par ailleurs, les indices américains sont plus riches en valeurs de croissance à forte valorisation, qui pâtissent souvent d’une remontée des taux longs.

A l’inverse, les indices européens comprennent plus de sociétés cycliques ou financières moins chères. Ils pourraient donc mieux se comporter à court terme que leurs homologues américains pendant la période de hausse des taux américains.

A court terme, nous surpondérons les actions européennes au détriment des actions américaines pour les raisons évoquées ci-dessus. Nous maintenons nos opinions Surpondérer à moyen terme sur les actions américaines et européennes et Neutre sur les autres zones géographiques.

 Les évolutions des marchés nous ont amené à relever les notes à court terme du secteur Alimentation/Boissons et celles de secteurs cycliques (Banques, Produits de Base, Construction & Matériaux) à Surpondérer ou à Neutre (Tourisme). Nous avons abaissé la note du secteur Services Financiers à Neutre à moyen terme et celles des secteurs Medias (à Neutre) et Technologie (à Sous pondérer) à court terme. De ce fait, nous privilégions à court terme des secteurs cycliques et financiers qui semblent meilleur marché. Pour assurer un bon équilibre des portefeuilles, nous préférons acheter sur repli les valeurs à bonne visibilité plus chères.

Nous conservons une opinion Sous-pondérer à court et à moyen terme sur les produits obligataires.

Lors de notre dernier Comité d’Allocation d’Actifs fin décembre, nous avions, par prudence, maintenu la légère sous-exposition en actions et très peu modifié la répartition de nos investissements.

Enfin, à l’occasion de cette première lettre de l’année, nous présentons à tous nos lecteurs nos meilleurs Vœux de bonheur, de réussite et de bonne santé.

Vincent GUENZI

Directeur de la Stratégie d’Investissement

Achevé de rédiger le 7 janvier 2022.